Édito

Gens du Cercle

Je vous aime gens du Cercle. Je vous aime orientés vers le soleil, dont on dit qu'il n'est pas bon pour la santé. Je vous aime en pleine forme un jour d'hiver où la mer est froide, et je vous aime plongeant là-bas des rochers, avec l'élan et le geste sûr de celui qui a toujours fait ce saut. Je vous aime remontant, détrempés et radieux, avec cet air qui proclame : «Voilà une bonne chose de faite ». Et je vous aime rêveurs, comme ahuris que tout cela soit possible, les baignades et les amis et la pizza et le lieu si beau, épargné par la modernité, la laideur. Je vous aime et je pense souvent à vous, et pensant à vous toujours je me dis : « Si j'étais à Marseille en ce moment, oh je suis bien certaine que quelqu'un m'emmènerait au Cercle des Nageurs », et soudain c'est comme si j'y étais. Oui soudain je vous vois, à demi étendus le front face à l'azur, le long des cabines à l'abri du vent, et je vous envie. Ou alors, la vérité est que je vous aime trop pour vous envier et, juste, je chéris l'image de vous dans le soleil des jours. Quand je me figure le bonheur, ce sont tous vos visages que je me représente, les petites rides sublimes parce que nées du plaisir d'être au Cercle, la belle nonchalance des flemmards, même si vous venez de nager deux kilomètres. Vos pieds nus qui connaissent chaque rugosité du sol. Vos jolis pieds palmés. Je vous connais, en quelque sorte. L'amour permet ces choses.

Par Sophie FONTANEL